Mise sur pied du CMPO : de nouvelles dispositions en vigueur pour les cancers professionnels

La loi « modernisant » le régime de santé et de sécurité du travail prévoyait de nouvelles dispositions touchant à la reconnaissance de certaines maladies professionnelles. Celles qui concernent les cancers causés par le travail viennent tout juste d’entrer en vigueur.

La réforme prévoyait la mise sur pied de comités des maladies professionnelles oncologiques (CMPO) chargés d’évaluer les réclamations pour cancer professionnel qui seraient soumises à la CNÉSST. Il était toutefois prévu que les nouvelles dispositions de la loi concernant ces réclamations ne s’appliqueraient qu’après la nomination par le gouvernement des membres d’un premier CMPO. Après près de trois ans d’attente, le gouvernement a finalement procédé, le 26 août dernier, à la nomination des quatre membres d’un premier comité. Les dispositions spécifiques aux réclamations pour cancer professionnel sont donc entrées en vigueur 60 jours plus tard, comme le prévoyait la loi, et s’appliquent désormais aux réclamations que la CNÉSST reçoit depuis le 25 octobre dernier.

Le CMPO est formé de trois médecins spécialistes et d’un hygiéniste du travail. Il est présidé par la Dre Marie-Laure Hemery. Pour le moment, le gouvernement et la Commission semblent s’attendre à ce qu’il soit en mesure de traiter, à lui seul, toutes les réclamations pour cancers professionnels dont il est chargé. Il n’est donc pas prévu de former d’autres CMPO pour le moment, même si la loi autoriserait le gouvernement à le faire, si nécessaire, dans l’avenir.

Les dispositions entrées en vigueur le 25 octobre prévoient que, dorénavant, toute travailleuse ou tout travailleur produisant une réclamation pour un cancer causé par son travail devra passer par le CMPO avant que la CNÉSST ne se prononce sur l’admissibilité de sa réclamation, à deux exceptions près.

Les deux exceptions concernent, d’une part, les réclamations pour les cancers pulmonaires (incluant le mésothéliome). Ces réclamations seront traitées par un comité des maladies professionnelles pulmonaires (CMPP), comme c’était déjà le cas avant. L’autre exception concerne les pompiers qui réclament pour un cancer, autre que pulmonaire, qui figure au Règlement sur les maladies professionnelles et qui bénéficient donc d’une présomption légale.

La CNÉSST soumettra systématiquement au CMPO toutes les réclamations qu’elle recevra pour un cancer autre que pulmonaire dont la victime n’est pas un pompier.

La loi prévoit que le CMPO étudie le dossier et examine la victime. Au besoin, le comité documente l’exposition de la travailleuse ou du travailleur aux contaminants présents dans le lieu de travail ou à tout autre facteur de risque. Le comité produit ensuite, par écrit, un rapport dans lequel il pose son diagnostic, donne son avis sur l’origine professionnelle de la maladie et, s’il y a lieu, fait état de ses constations sur les limitations fonctionnelles, l’atteinte permanente et la tolérance de la travailleuse ou du travailleur.

La CNÉSST sera liée par les conclusions du CMPO sur les questions médicales et ne rendra sa décision sur l’admissibilité de la réclamation qu’après réception de son rapport. Notons, par ailleurs, que la Commission n’est pas liée par l’avis du comité sur la relation entre la maladie et le travail. Donc, même si le CMPO estime qu’il s’agit bien d’un cancer d’origine professionnelle, la CNÉSST pourrait rejeter la réclamation.

Ce nouveau processus, en vigueur depuis la fin d’octobre, correspond donc à une sorte de procédure de contestation automatique de l’avis du médecin traitant dans les cas de cancers professionnels, analogue à celle qui existe pour les victimes de maladies pulmonaires (qu’on envoie au CMPP). En effet, rappelons que, pour réclamer, la victime d’un cancer doit déjà obtenir une attestation médicale de son médecin (généralement l’oncologue qui traite le cancer). Mais au moment de traiter la réclamation, la CNÉSST ne sera jamais liée par l’avis de ce médecin traitant, mais plutôt par celui du CMPO.

L’autre effet pervers prévisible de ces nouvelles dispositions est l’étirement probable des délais pour le traitement des réclamations. Certes, la loi prévoit des délais dans lesquels le comité doit examiner la travailleuse ou le travailleur et produire son avis. Mais si le passé est garant de l’avenir, on peut prédire que ces délais ne seront pas respectés. Du moins, c’est ce qui se passe pour les victimes de maladies professionnelles pulmonaires.

Quoi qu’il en soit, les nouvelles dispositions sont en vigueur, le comité est formé et on verra dans les prochains mois quels seront ses effets concrets sur la reconnaissance des cancers professionnels au Québec.

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