Le projet de règlement sur les mécanismes de prévention est sur la table

Le 3 janvier dernier, le projet de règlement sur les mécanismes de prévention et de participation était publié à la Gazette officielle du Québec.  Attendu depuis l’automne dernier, lorsque les organisations syndicales et patronales représentées à la CNÉSST se sont entendues sur son contenu, ce règlement encadrera les mécanismes de prévention qui s’appliqueront éventuellement dans tous les milieux de travail.

La Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST), entrée en vigueur en 1979, prévoyait l’entrée en vigueur graduelle des mécanismes permettant la participation des travailleuses et des travailleurs à la prévention des lésions professionnelles.  Il s’agit notamment des comités paritaires de santé et de sécurité du travail et de ce qu’on appelait à l’époque les représentants à la prévention (devenus représentants en santé et sécurité du travail depuis la réforme).

S’ils sont bien utilisés par des travailleuses et travailleurs organisés, ayant à cœur la prévention des lésions professionnelles et capables de faire pression sur leur employeur, ils peuvent permettre d’améliorer la santé et la sécurité dans un milieu de travail.  Dans les milieux où ils s’appliquent depuis longtemps et sont utilisés correctement, ces mécanismes ont effectivement permis de réduire les risques et de diminuer les accidents et les maladies du travail.

Jusqu’à récemment, ces mécanismes ne s’appliquaient qu’à une minorité de milieux de travail, soit les secteurs des groupes dits « prioritaires » présentant les risques les plus élevés.  C’était d’ailleurs le principal élément que devait modifier le projet de loi no 59 du ministre Boulet, adopté en 2021, sous prétexte de les étendre à tous les milieux.  La réforme prévoyait toutefois qu’un règlement devait être adopté pour en encadrer l’application.  Pendant des mois, il a été l’objet d’âpres négociations entre les organisations syndicales et patronales qui siègent à la CNÉSST.  Elles ont fini par s’entendre autour du projet de règlement publié le 3 janvier dernier.

Le projet de règlement divise les milieux de travail en 4 niveaux de risques.  Seuls les travailleuses et travailleurs occupant des emplois classés comme les plus à risque (niveau 4) bénéficieront des temps de libération prévus par la LSST de 1979 pour faire de la prévention.  On parle ici notamment du temps dont disposera le représentant en santé et sécurité des travailleuses et travailleurs.  Les secteurs d’emplois qui se retrouvent dans les niveaux de risques 3, 2 ou 1 n’auront qu’une fraction de ce temps de libération (qui diminue évidemment en proportion avec le niveau de risques).

L’uttam déplore que pour bien des milieux de travail, le temps de libération prévu par le projet de règlement sera très loin de celui que prévoyait à l’origine la LSST.  Mais c’est surtout l’insuffisance de ce qui est prévu pour la prévention dans les milieux non syndiqués qui nous préoccupe et nous choque.

En effet, les mécanismes de prévention prévus par la LSST n’ont jamais réellement fonctionné dans les milieux non syndiqués.  Ces mécanismes reposent sur la participation des travailleuses et travailleurs.  Sans organisation syndicale pour les unir, les organiser, les former et les défendre face à l’employeur, les travailleuses et travailleurs peuvent difficilement désigner librement leurs représentants, exercer les droits que leur confère la loi et participer efficacement à la prévention.

Pour cette raison, l’uttam revendique depuis des mois, de concert avec trois autres organisations qui défendent les droits de travailleuses et travailleurs non-syndiqués, soit le Centre des travailleurs et travailleuses immigrants (CTTI), le Réseau d’aide aux travailleuses et travailleurs migrants agricoles du Québec (RATTMAQ) et le Conseil d’intervention pour l’accès des femmes au travail (CIAFT), la mise sur pied d’une ressource indépendante dédiée au soutien, à l’information et à la formation des travailleuses et travailleurs non syndiqués en prévention.  Nos quatre organisations ont rencontré le ministre du Travail, en février 2023, pour revendiquer un financement pour la mise sur pied d’une telle ressource.  Malgré de belles promesses du ministre, rien n’a avancé.

Nos quatre organisations viennent de produire des commentaires conjoints pour revendiquer des modifications au projet de règlement, afin qu’il fonctionne minimalement dans les milieux non-syndiqués.  Nous attendons la réponse à nos demandes et poursuivons les pressions sur le ministre Boulet pour la mise sur pied d’une ressource indépendante de soutien pour les travailleuses et travailleurs non syndiqués.

Nous continuerons la lutte pour le droit à la santé et la sécurité au travail pour toutes les travailleuses et tous les travailleurs, tant qu’il faudra !

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