C’est ce matin à Québec que débutent les consultations sur le Projet de loi no 101 à la Commission de l’économie et du travail. Malheureusement, les associations qui représentent les victimes d’accidents et de maladies du travail en sont exclues, bien que ce projet de loi risque de frapper de plein fouet les travailleuses et travailleurs victimes de lésions professionnelles.
Déposé par le ministre du Travail Jean Boulet le 24 avril dernier, ce projet de loi « omnibus » prévoit des changements à plusieurs lois qui encadrent le travail. De nombreux changements qu’il propose méritent d’être dénoncés. Pour ne donner qu’un exemple, mentionnons l’instauration d’un régime discriminatoire de prévention pour les secteurs de la santé et de l’éducation, des milieux de travail à prépondérance féminine.
Toutefois, comme organisation vouée à la défense des victimes de lésions professionnelles, c’est surtout la mise en place d’un nouveau processus de négociation en révision administrative que l’Union des travailleuses et travailleurs accidentés ou malades (uttam) souhaite avant tout dénoncer.
Le projet de loi no 101 (PL 101) prévoit qu’à la suite d’une demande de révision portant sur certains sujets dans un dossier de lésion professionnelle (la liste est très large et comprend notamment toute décision touchant au droit à une indemnité de remplacement du revenu), une personne-facilitatrice, mandatée par la CNÉSST, contactera les parties pour tenter de négocier une entente afin de mettre fin au litige.
Le processus prévu par le PL 101 est complètement vicié et ne prévoit aucune des garanties qu’on est en droit d’attendre d’un mode alternatif de règlement des litiges. Il s’agira d’une négociation à trois parties, entre la victime de la lésion, son employeur et la personne-facilitatrice qui devra jouer le rôle hybride d’arbitre de la négociation et de représentant de la CNÉSST. Une négociation arbitrée par une personne représentant une partie dans un litige est totalement inacceptable et va à l’encontre de tous les principes reconnus d’une médiation juste et équitable.
Cette « négociation » en révision surviendra au moment où les travailleuses et travailleurs sont pratiquement toujours non représentés et souvent dans un état de grande vulnérabilité. Les travailleuses et travailleurs non-juristes, risquent de se faire piéger dans ce processus. Ils devront en effet négocier leurs droits sans maîtriser le langage juridique ni les détails de la loi, face aux experts qui représenteront l’employeur et la CNÉSST.
Sans tiers neutre pour informer et éclairer les victimes sur les enjeux de la négociation et les conséquences d’une entente, le processus introduit par le PL 101 deviendra rapidement une machine à fermer des dossiers à toute vitesse par des ententes à rabais. Le projet de loi prévoit en outre qu’une fois l’entente négociée, elle met fin au litige, lie les parties et n’est pas contestable au Tribunal. C’est ainsi que le piège risque de se refermer sur bien des travailleuses et des travailleurs…
Huit organisations patronales, sept groupes syndicaux, deux universitaires et un groupe communautaire seront entendus lors des consultations qui débutent ce matin. Aucune association de victimes de lésions professionnelles n’a été invitée. Malgré nos demandes d’être entendu, l’uttam est exclue des consultations.
Il n’y aura donc aucune voix pour faire entendre les préoccupations spécifiques des non-syndiqués victimes de lésions professionnelles sur ce projet de loi. Les non-syndiqués, qui représentent plus de 60% des travailleuses et travailleurs, rappelons-le, risquent pourtant d’être les premières victimes du processus de négociation en révision que le projet de loi introduit.
L’uttam a malgré tout déposé son mémoire sur le PL 101 à la Commission de l’économie et du travail et l’a partagé aux députés qui y siègent. Nous suivrons de près les consultations, qui se terminent le 2 juin, et ce qui suivra. On s’attend à ce que l’étude détaillée du projet de loi débute dès la mi-août et que le gouvernement tente de le faire adopter dès septembre à l’Assemblée nationale.
Soyons prêtes et prêts à nous mobiliser pour nos droits et à nous faire entendre d’ici là!
Pour consulter l’horaire des consultations : Commission de l'économie et du travail
Pour suivre les présentations de mémoires : Webdiffusion de l'Assemblée nationale Sélectionnez la Commission de l’économie et du travail